#FreeSenegal: Las redes sociales explican las protestas políticas en Senegal

El observatorio Afriques Connectées contabilizaba en menos de tres días, desde el mediodía del jueves 4 de marzo hasta las nueve de la mañana del domingo 7 de marzo, casi 1,3 millones de mensaje emitidos solo en Twitter utilizando la etiqueta #FreeSenegal. Todo eso, a pesar de la incidencia en Internet, que ha afectado especialmente a las redes sociales y que se ha traducido en una reducción del ancho de banda, presuntamente, para dificultar la difusión de fotos y vídeos de las manifestaciones, aunque sin éxito.


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Réputation des marques : 5 tendances à suivre

L’année 2020 marquera à jamais un tournant dans notre société. La digitalisation forcée du monde a poussé les entreprises à penser “online” avant “offline”. C’est indéniable, dorénavant, tout se passe en ligne. La e-réputation devient la réputation, tout court.

L’utilisation des réseaux sociaux comme canal de mobilisation par les internautes africains est la tendance marquante de cette année. En Guinée, au Cameroun ou encore en RDC, ils ont été mis à profit pour porter des revendications au-delà des frontières. Au Nigéria, le mouvement #EndSARS qui dénonçait les violences policières (169 millions de tweets en 2 mois), a été mis en lumière par plusieurs personnalités internationales. Il s’agit là d’une nouvelle donne dans le rapport de force entre les citoyens et leurs autorités.


Manon Fouriscot & Jérémy Cauden, cofondateur d’Afriques Connectées.


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Les réseaux sociaux, la nouvelle arme de la jeunesse africaine

Aujourd’hui, le Nigeria est devenu l’un des exemples les plus illustratifs de l’usage puissant que peuvent faire les jeunes des réseaux sociaux. En effet, depuis plusieurs jours maintenant, l’actualité du pays est secouée par une véritable tempête de revendications : le mouvement END SARS.

Si aujourd’hui, les manifestations ont viré à un affrontement avec l’armée qui n’a pas hésité à tirer à balles réelles sur des civils, le mouvement est encore très loin de s’éteindre et semble se nourrir chaque jour un peu plus du cadre d’expression plus libre que lui offrent les réseaux sociaux. Selon la plateforme Afriques Connectées, le #ENDSARS comptabilise déjà en l’espace de 3 semaines, près de 150 millions de tweets. Entre le 20 et le 21 octobre, plus de 4 millions de tweets ont été envoyés pour dénoncer la répression sanglante des manifestants au Lekki Toll Gate.


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#EndSARS: Nigeria se subleva contra la violencia policial

Desde el 3 de octubre hasta el repunte del viernes 9, el laboratorio de análisis de redes sociales Afriques Connectées había monitorizado casi 2,4 millones de mensajes bajo la etiqueta #EndSARS. Sin embargo, desde el mediodía del viernes y durante el fin de semana los intercambios se hicieron frenéticos y provocaron que, en 48 horas, se emitiesen más de 28 millones de mensajes.

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Le Nigeria dissout une unité de la police après une forte mobilisation des jeunes et des artistes

Les autorités nigérianes ont annoncé la dissolution d’une unité de police controversée, dimanche 11 octobre, après une semaine de forte mobilisation de la jeunesse, portée par les stars du cinéma et de la musique, notamment sur les réseaux sociaux. « La Brigade spéciale de répression des vols (SARS) a été dissoute avec effet immédiat », a fait savoir la présidence sur son compte Twitter. 

Manon Fouriscot, cofondatrice d’Afriques Connectées, un organisme panafricain d’analyse des réseaux sociaux, souligne « une utilisation rapide et massive des réseaux sociaux, une mobilisation active des stars nationales et un passage d’une mobilisation en ligne à une mobilisation dans la rue », qui constituent selon elle un « cas d’école » sur le continent.

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Nigeria: montée de la contestation contre les violences policières

Des centaines de personnes sont descendues vendredi dans les rues de plusieurs grandes villes du Nigeria pour protester contre les violences policières, au lendemain de violences ayant fait deux morts dans le Sud.

La contestation est née sur les réseaux sociaux après la diffusion d’une vidéo montrant des agents présumés de la Brigade spéciale de répression des vols (SARS) tuant un homme à Ughelli, dans l’Etat du Delta (sud).

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Quelle perception de la Chine sur les réseaux sociaux en Afrique durant la pandémie ?

35° Nord et Afriques Connectées, laboratoire d’analyse des phénomènes viraux en œuvre sur les réseaux sociaux en Afrique, s’allient afin de couvrir et analyser les discussions sur les réseaux sociaux africains durant la pandémie du Covid-19. 

35° Nord et Afriques Connectées proposent une étude des discussions qui ont pris place lors de la pandémie de Covid-19  sur les réseaux sociaux africains ayant trait à la Chine et à ses actions sur le continent. 

Contexte de l’étude

Depuis le début de la pandémie mondiale, la Chine multiplie les opérations d’aide internationale en direction de plusieurs États dont de nombreux pays d’Afrique. 

Alors que les relations entre l’Empire du Milieu et le continent africain ne cessent de s’intensifier depuis plusieurs années, les récentes actions de la Chine, qualifiées de « diplomatie du masque » par certains, ont donné lieu à de nombreux commentaires sur les réseaux sociaux en Afrique. La gestion chinoise de la pandémie sur son territoire a également été l’objet de vives discussions en ligne, notamment sur le cas, très politique, d’expatriés africains confrontés au racisme dans plusieurs villes du pays. 

Comment réagissent les internautes africains aux actions chinoises sur leur continent ? Sont-ils les seuls à en débattre ? Quels sont les différents traits d’image de la Chine vis-à-vis des Africains en ligne ?
Un panel de réactions et publications sur Twitter et sur Facebook relatives à ces relations sino-africaines à l’heure de la pandémie de Covid-19 a été collecté entre le 6 mai et le 3 juin avec l’aide de la plateforme Visibrain, pour constituer le corpus de la présente étude.

Données analysées

Afriques Connectées a analysé près de 120 000 tweets postés sur Twitter entre le 6 mai et le 3 juin par plus de 47 000 comptes Twitter, qui ont ainsi généré plus de 2 milliards d’impressions
Les internautes engagés dans ces conversations ont été particulièrement actifs, on dénombre une moyenne de 2 tweets par internaute ayant publié un message et 2,5 RT par internaute, preuve d’une intense mobilisation des comptes.
Sur Facebook, ce sont plus de 6 500 publications postées par 3 800 pages qui ont été passées au crible. Si le  sujet des relations sino-africaines n’a suscité qu’un engagement relatif (un peu plus d’une centaine d’interactions par publication), il a en revanche drainé une visibilité très importante : près de 10 milliards d’impressions sur les posts évoquant les actions de la
Chine vis-à-vis de l’Afrique.

Une multiplicité d’acteurs prend part aux discussions relatives aux relations entre la Chine en l’Afrique : des comptes anonymes d’internautes africains au Président Donald Trump, les profils des acteurs qui se sont emparés de ce sujet sont réellement protéiformes

Analyse communautaire

Précisions méthodologiques  de la cartographie Twitter

Sur plus de 47 000 comptes ayant publié sur le sujet collectés, nous avons cartographié les 1 800 comptes les plus influents. La taille de ces comptes (nœuds) est proportionnelle à leur influence au sein des conversations (eigenvector centrality).

Les nœuds ont été répartis par proximité conversationnelle et relationnelle via le filtre statistique de Modularité (code couleur). Ces relations n’existent qu’à partir des tweets récupérés ici et non pas d’un historique relationnel. Les couleurs matérialisent chacune une communauté thématique.

Des acteurs multiples et protéiformes

Si une forte présence de comptes de médias chinois (comme @CGTNOfficial ou @XHNews) est à noter parmi les comptes à l’audience la plus importante, ces derniers présentent une influence toute relative au regard des faibles taux d’engagement générés par leurs tweets. 

Le sujet des relations sino-africaines est également fortement préempté par des comptes d’activistes ou militants africains reconnus en ligne, à l’image de @bonifacemwangi militant kenyan particulièrement engagé contre la corruption et dont les tweets ont été retweetés à plus de 1 500 reprises, ou encore le blogueur @gabrieloguda retweeté près de 900 fois.

Cartographie des 3 300 hashtags utilisés dans les tweets ayant trait aux conversations Chine-Afrique, regroupés par proximité conversationnelle et relationnelle (Modularité)

3 300 hashtags ont été utilisés par les internautes ayant pris part aux conversations sur Twitter. 

Le hashtag #ChinaIsNotOurProblem est l’un des hashtags les plus utilisés par les internautes africains pour évoquer les relations entre la Chine et l’Afrique, particulièrement au Nigeria. 

Le contexte de mobilisation mondiale contre les violences à l’encontre des Noirs trouve un écho particulier sur le continent, avec le hashtag #BlackLivesMatter fréquemment intégré aux tweets des internautes sur le sujet Chine-Afrique. 
#ChinaAfricaImpact, utilisé régulièrement et au long cours, permet de concentrer les conversations sur les initiatives chinoises en faveur du développement. Ce hashtag est principalement utilisé pour le Kenya et par des Kenyans.

Entre aide et mainmise de la Chine en Afrique

Aide de la Chine à l’Afrique : des avis partagés 

L’aide humanitaire et sanitaire apportée par la Chine sur le continent africain suscite des commentaires positifs mais également des doutes

Les autorités africaines ont, de leur côté, été promptes à remercier Pékin pour l’aide apportée à leurs pays. Du côté des populations, bien que les conversations ne soient pas polarisées entre deux visions manichéennes vis-à-vis de l’action de la Chine, certains internautes dénoncent les intentions cachées de cette dernière, masquées sous le vernis de la philanthropie

Ces attaques sont cependant contre-balancées par l’inaction, voire le désintérêt des autres grandes puissances mondiales, et notamment des USA qui, depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, sont perçus comme désireux de se désengager, d’un point du vue économique, humanitaire mais aussi sécuritaire, de l’Afrique. 

Les médias chinois, comme China Xinhua News ou encore People’s Daily China, sont très actifs pour relayer les actions du pays en Afrique. Ils génèrent des taux d’engagements très importants, sans qu’il soit possible de localiser de façon exhaustive la provenance des interactions. Les internautes chinois sont toutefois nombreux à saluer ces initiatives en Afrique, notamment concernant la lutte contre le Covid-19, exaltant la fierté chinoise face à l’OMS ou encore les USA, et le rôle que la Chine doit jouer sur l’échiquier mondial. 

Méfiance envers la “bienveillance” de la Chine

La publication et l’annonce, par NTV Kenya, de l’ouverture d’une école financée par la Chine et dont les enseignements seront dispensés exclusivement en mandarin a généré des commentaires virulents, et un nombre de réactions “Angry / colère” très élevé, représentant plus de 10 % des réactions. 

Cependant l’expression de cette méfiance à l’égard de la Chine en Afrique doit être pondérée et nuancée. En effet, la Chine n’est pas l’unique puissance étrangère à être accusée de privilégier ses intérêts économiques et commerciaux sur le continent noir. Nombreuses sont les publications accusant la Chine, la Russie, les USA ainsi que l’Europe de vouloir s’accaparer le “gâteau africain”.

Le dirigeant de Texas Grillz a généré près de 4 000 likes, 800 partages et plus de 900 commentaires sur Facebook lorsqu’il dénonçait fin mai “l’hypocrisie ivoirienne et africaine” au sujet des critiques sur l’implantation d’activités économiques chinoises dans le pays et sur le continent. Au Kenya, des internautes s’inquiètent de l’influence toujours grandissante de la Chine sur l’économie du pays. D’autres affirment que “les Africains sont bien conscients des lacunes de l’assistance et des affaires chinoises en Afrique – du déséquilibre commercial à la dette lourde, des produits de mauvaise qualité aux pratiques de corruption”.

Les actions de la Chine au crible des internautes

La Chine est perçue comme l’un des bâtisseurs d’infrastructures les plus actifs sur le continent africain et notamment dans les pays anglophones de la côte est de l’Afrique (Kenya, Tanzanie). Cependant, la qualité des infrastructures érigées par l’Empire du Milieu sont souvent décriées pour leur qualité et durabilité. Le pont de Sigiri au Kenya qui s’est effondré en 2017, deux semaines après son inauguration, constitue encore aujourd’hui un élément d’image prégnant pour mettre en cause les réalisations chinoises sur le continent. 

Par ailleurs, la Chine est fortement accusée de réaliser des infrastructures à dessein, dans le but de développer et nourrir sa politique de renseignement. Ce trait d’image est une constante de la perception de l’action chinoise depuis 2018 et l’espionnage informatique du siège de l’UA à Addis-Abeba (Le Monde, janvier 2018). Ces sujets génèrent très régulièrement de forts taux d’engagement sur les réseaux sociaux, provenant d’Afrique mais aussi du monde entier.

Actions chinoises et résurgence de problèmes internes aux pays d’Afrique

L’aide humanitaire et sanitaire apportée par la Chine sur le continent génère des crispations liées à la gouvernance et à la gestion propre à chaque pays. Ainsi les annonces du Ministère de la Santé Publique du Cameroun sur l’aide sanitaire chinoise ont suscité de vives et nombreuses critiques liées à la corruption des autorités et la redistribution aux populations des matériels et des dons. 
Au Nigéria, les actions et plus globalement l’influence de la Chine peuvent susciter et exacerber les tensions “ethniques”. En effet, certains internautes nigérians génèrent d’important taux d’engagements lorsqu’ils dénoncent les collusions de l’ethnie historiquement au pouvoir, qu’ils accusent parfois frontalement de brader la souveraineté nationale à la Chine, au bénéfice du clan au pouvoir.

Réaffirmation de la souveraineté des Etats

En Côte d’Ivoire, la rumeur de l’arrivée de 60 voyageurs chinois qui auraient pu entrer mi-mars sans être ni testé ni mis en quarantaine avait fait grand bruit sur les réseaux sociaux, alors que les premières mesures fermes, dont la fermeture des frontières, avaient été prises par les autorités. Une situation similaire au Kenya a également suscité de massifs partages et dénonciations d’un statut privilégié accordé aux arrivants chinois. 

Au Rwanda, la décision du Président Paul Kagamé de renvoyer 18 Chinois a été massivement saluée sur des pages panafricaines et d’actualités généralistes.
Il est tout de même notable que ces dénonciations provenant des internautes africains ne font pas l’objet d’une expression xénophobe à l’égard des Chinois. Elles renvoient davantage à une demande d’affirmation de souveraineté et d’indépendance des États ou des institutions africaines, ou plus largement d’une égalité de traitement.

L’Inde, nouveau concurrent de la Chine sur le continent africain ?

Le continent africain est au centre des convoitises des puissances étrangères. Les difficultés que la Chine pourrait présenter dans le développement de ses activités en Afrique constituent des opportunités pour d’autres. 
Les médias et réseaux sociaux indiens évoquent régulièrement les failles et fébrilités chinoises en Afrique ouvrent des perspectives à la deuxième grande puissance asiatique pour mettre en place et développer des nouveaux partenariats avec le continent africain, au regard de l’expérience chinoise de laquelle tirer des enseignements.

La question du racisme de la Chine envers les Africains

Mobilisation #BlacksInChina pour les Africains maltraités en Chine

Le sujet du racisme envers les Africains constitue un axe de visibilité prégnant concernant la Chine, ravivé durant la pandémie de Covid-19. Sur les réseaux sociaux, les témoignages et vidéos affluent, provenant des médias (BBC News Africa), de comptes d’actualités généralistes africaines (Africa Facts Zone) ou d’internautes lambda, dénonçant avec fermeté le sort réservé aux ressortissants africains en Chine. Ces derniers ont été mis en quarantaine de force, aspergés de désinfectant à l’entrée des magasins, sans pouvoir être autorisés à y entrer. 

Portées par les hashtags #BlacksInChina et #BlackChina, utilisés à eux seuls à plus de 8 300 reprises, ces dénonciations ont pris davantage d’ampleur avec le contexte mondial des violences contre les Noirs. Dès lors, est observable une convergence avec le mouvement #BlacksLivesMatter. 

Malgré la virulence et la légitimité de ces dénonciations, aucune prise de parole xénophobe provenant d’un internaute africain n’a suscité de reprises massives à l’égard des autorités et populations chinoises. La xénophobie ne semble pas faire partie des ripostes et critiques africaines contre les Chinois.

Réponses africaines au racisme chinois

Plusieurs officiels africains sont montés au créneau à la suite de la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos des mauvais traitements infligés à leurs compatriotes sur le territoire chinois. 

Le 9 avril dernier, le Ministère des Affaires étrangères du Nigeria a sollicité un entretien avec l’Ambassadeur chinois au Nigeria lors duquel il a demandé une intervention immédiate de Pékin

L’Union Africaine a également réagi, dans un communiqué publié sur ses comptes sociaux, affirmant que “l’Afrique valorise sa relation avec la Chine, mais pas à n’importe quel prix”. 
Malgré ces réponses diplomatiques, les internautes africains restent nombreux à estimer les réactions de leurs autorités trop timides pour condamner et s’opposer à ces traitements, l’influence et la mainmise de la Chine sur les politiques intérieures en lame de fond.

L’instrumentalisation du racisme envers les Africains au cœur des relations internationales

La question du racisme chinois envers les Africains, si elle a d’abord été restreinte à l’Afrique, a rapidement dépassé les frontières du continent pour se muer en véritable alibi pour mener une bataille d’image et d’influence entre les puissances américaines et chinoises par prises de parole diplomatiques interposées. 

Les États-Unis se sont, dès les prémices de la crise, engouffrés dans la brèche. Alors que le porte-parole du département d’Etat américain déplorait un partenariat creux entre la Chine et l’Afrique, mis en exergue par les mauvais traitements infligés aux Africains sur le territoire chinois, le Président Trump a été jusqu’à saisir le cas du racisme de la Chine à l’encontre des Africains pour justifier sa décision de retirer son pays de l’Organisation Mondiale de la Santé

En plein contexte des manifestations “Black Lives Matter” aux États-Unis, la Chine a publié un communiqué pour dénoncer la maladie chronique du racisme américain, suscitant les railleries des internautes africains qui relèvent l’ironie de la situation en mettant en parallèle le cas de leurs compatriotes durant confrontés au racisme chinois. 
Tandis que les Etats-Unis et la Chine se livrent cette bataille d’influence, des autorités africaines comme Paul Kagame et Moussa Faki Mahamat élèvent la voix et appellent à recentrer l’attention sur la gestion de la crise.

Le pangolin comme symbole de l’exploitation de la biodiversité africaine

La Chine mise en cause pour son exploitation de l’environnement africain

L’activité d’exploitation des ressources issues de la biodiversité africaine par la Chine constitue un vif levier de critique par les internautes africains, comme par des internautes venant du monde entier. 

Cela vient du fait que la majeure partie des publications sur le sujet est issue de pages environnementales non africaines. Au Ghana, c’est l’exploitation de la bauxite par la Chine qui suscite l’ire des internautes du pays. 

La Chine n’est cependant pas l’unique pays visé par les critiques : plus globalement les internautes de tous pays dénoncent les méfaits du capitalisme, de son activité extractrice et mettent en cause la société de consommation, ainsi que le rôle des Etats-Unis dans cette tendance. 
National Geographic a publié début juin un article affirmant que la Chine  avait retiré de la liste 2020 des médicaments traditionnels approuvés par les autorités dont “les écailles de pangolin, figurant dans la pharmacopée du pays depuis des décennies”, animal soupçonné d’être à l’origine de la diffusion de la pandémie de Covid-19. Ces cinq dernières années, 90 % des 62 tonnes de pangolins saisis à Hongkong provenaient du Nigeria.

Le respect des animaux en toile de fond des critiques à l’encontre de la Chine

De nombreux tweets, au début du mois de juin, publiés avec le hashtag #CorruptChineseDonkeyDeals dénoncent avec virulence le sort réservé aux ânes africains : “La Chine ayant tué presque tous ses ânes a recouru à l’importation de l’animal d’Afrique. Les ânes sont volés au Kenya et stockés dans les conditions les plus horribles avant d’être abattus.”
D’autres rappellent que de nombreux pays africains ont pris la décision de stopper l’exportation des ânes africains vers la Chine et encouragent les autorités de leur pays à en faire autant et notamment le Kenya qui semble le pays africain le plus touchés par ces agissements. L’ONG de protection de la cause animale PETA s’est elle-même engagée sur le sujet en lançant une pétition.

En résumé

Les discussions sur les actions de la Chine dans les pays africains suscitent des débats passionnés, nuancés, éloignés d’une vision polarisée ou manichéenne. Les actions d’aide matérielle et médicale chinoise en Afrique sont saluées en ligne, en particulier par les autorités africaines, toutefois la mainmise de la Chine sur les économies africaines et plus particulièrement la faiblesse des souverainetés du continent constituent des axes de visibilité majeurs sur cette thématique. 

Malgré les efforts déployés par la Chine sur le continent, les internautes africains ne semblent que peu goûter à la philanthropie chinoise, dont ils doutent de la sincérité désintéressée, en attestent l’utilisation massive de l’emoji de réaction “angry” sur Facebook (6% des réactions enregistrées sur les posts) et les différents hashtags de mobilisation panafricaine en défense des diverses offensives de la Chine. La condamnation des actes racistes des Chinois à l’égard des Africains est ainsi l’un des leviers premiers de visibilité, décuplé par le contexte mondial. Ce racisme, instrumentalisé, est devenu un véritable alibi à la bataille d’image que se mènent Chine et États-Unis. 

L’exploitation de la biodiversité africaine par des entreprises chinoises est par ailleurs un trait d’image non-négligeable de la Chine en Afrique, un sujet porté par des internautes du monde entier. 
Avec la pandémie, la Chine renforce son travail d’influence et de soft power, en s’appuyant notamment via son secteur privé comme la Fondation Jack Ma (très active dans la fourniture de matériel de lutter contre la pandémie en Afrique), mais également sur les réseaux sociaux. Depuis le début du mois de juin, la Fondation Jack Ma s’entoure d’influenceurs africains pour trouver des relais à son discours et polir son image auprès de la jeunesse connectée d’Afrique.

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[La Tribune Afrique] Etude : comment les internautes africains perçoivent la Chine et ses actions sur le continent

La présence, l’action de la Chine en Afrique ont toujours été au centre des intérêts – parfois des préoccupations – des Etats, des géopoliticiens, des économistes, etc. Cette fois-ci, ce sont deux spécialistes de la communication qui se penchent sur le sujet, mais sous un angle plutôt original qui pourrait servir de base à des analyses encore plus poussées. En effet, 35°Nord, agence de conseil en stratégie de communication dédiée au continent africain, et Afriques Connectées, laboratoire d’analyse des phénomènes viraux en œuvre sur les réseaux sociaux en Afrique, viennent de révéler les résultats d’une étude sur la perception par les internautes africains de la Chine et de ses actions sur le continent durant la pandémie qui sévit actuellement.


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Un vaccin contre le Covid-19 testé en Afrique ? Retour sur une polémique née sur les réseaux sociaux

Cartographie resserrée des 5 500 comptes les plus influents (selon le filtre statistique Eigenvector centrality), classée et regroupée par proximité conversationnelle et relationnelle (Modularité) .

Le 1er avril dernier, le chercheur français Camille Locht, qui officie à l’INSERM, et le médecin Jean-Paul Mira de l’hôpital Cochin échangeaient sur la chaîne d’information continue LCI au sujet du développement de méthodes médicales pour lutter contre la crise du Covid-19. Sur un ton qu’il qualifie de “provocateur”, Jean-Paul Mira y propose de tester des vaccins sur le continent africain et des populations fragiles “comme cela a pu être fait sur des prostituées” il y a quelques années. Camille Locht abonde dans ce sens et affirme qu’un appel d’offre va être émis auquel l’INSERM répondra très certainement. Ces quelques minutes de discussion ne sont pas passées inaperçues et ont suscité une vague massive d’indignation sur les réseaux sociaux, portée par des internautes africains et issus de la diaspora. Cet événement constitue certainement l’une des premières polémiques d’ampleur mondiale sur les réseaux sociaux concernant un sujet médical et sanitaire en Afrique.

Afriques Connectées a analysé l’ensemble des réactions et publications sur Twitter et sur Facebook provenant de cette polémique a été collecté entre le 1er et le 9 avril, avec l’aide de la plateforme Visibrain.

Chronologie de la polémique

  • Fin mars : les vaccins font l’objet d’un bruit de fond critique sur les intérêts de lobby pharmaceutique en Afrique. Il est un des ressorts du discours anti-impérialiste en ligne. En témoigne les critiques sur la volonté de la fondation Bill Gates de développer des vaccins pour l’Afrique.
  • 1er avril : diffusion de l’émission de LCI à l’antenne. Premiers extraits de l’émission, filmés au smartphone, publiés sur Twitter.
  • 2 avril : début de la polémique sur Twitter avec 60 000 tweets postés, mobilisation des stars du football et de la musique, lancement de la pétition Change.org, relayée par Booba, et publication d’un communiqué par l’INSERM pour démentir les allégations et contrer les critiques exprimées
  • 3 avril : pic de visibilité sur Twitter et sur Facebook, l’INSERM publie les excuses de son chercheur Camille Locht
  • À partir du 4 avril : visibilité résiduelle décroissante

Sur les réseaux sociaux, une mobilisation rapide et d’ampleur

Au total, on dénombre près de 210 000 tweets et retweets postés par plus de 120 000 comptes entre le 1er avril et le 9 avril, générant 430 millions d’impressions potentielles.

L’ampleur de la crise est due à deux facteurs concomitants :

  • la proportion d’internautes ayant posté un tweet, et pas simplement effectué des RT, est très importante : elle concerne plus d’un internaute sur quatre (21 427 au total)
  • le volume de RT est conséquent, on en dénombre pas moins de 180 000, ce qui a permis à la polémique de s’exporter largement au-delà du noyau d’acteurs ayant pris la parole sur le sujet sur le réseau.

Donnée intéressante : le nombre de vidéos postées nativement dans un tweet. Preuve de l’emballement de la polémique, 80% de ces vidéos ont été postées entre le 3 et le 7 avril, offrant un second souffle à la crise née avec les premières publications de l’extrait vidéo de LCI. L’existence du support vidéo (et les captures d’écran rendues possibles) permet de fixer l’événement de façon tangible et favorise les reprises et les partages.

Côté Facebook, si le sujet a atteint un nombre très conséquent de profils (plus de 260 millions d’impressions), il a également suscité une forte activité : en atteste le nombre d’interactions générées par les 1 710 posts analysés. En moyenne, chaque post a ainsi été liké, commenté et partagé plus de 2 300 fois.

Analyse communautaire de la polémique

Plus de 90 000 comptes Twitter collectés, 44 000 comptes dont les relations conversationnelles sont cartographiées. La taille des noeuds (comptes) est proportionnelle à leur influence au sein du réseau de conversation (filtre statistique d’autorité eigenvector centrality). Les noeuds ont été répartis par proximité conversationnelle et relationnelle via le filtre statistique de Modularité (code couleur). Ces relations n’existent qu’à partir des tweets récupérés ici et non pas d’un historique relationnel. Chaque couleur représente une communauté.

Les stars internationales, leviers de la médiatisation

Le rappeur Booba a été la première star internationale à relayer la vidéo LCI dans la nuit du 1er au 2 avril. Booba figure également parmi les premiers relais d’ampleur d’une pétition hébergée sur la plateforme Change.org. Cette pétition est le lien le plus partagé sur Twitter (8 753 partages sur la période), elle comptabilise plus de 130 000 signatures.

Booba a été rejoint par d’autres artistes comme Dosseh, Kaaris, Rohff, Fary, mais aussi par des footballeurs comme Didier Drogba, Demba Ba, Olivier Dacourt.

En suscitant des milliers de RT et de likes, ces comptes ont joué le véritable rôle d’amplificateur de la polémique en élargissant la propagation du contenu décrié à une audience considérable, grand public, pas nécessairement politisée ou coutumière de ce genre de sujet. De plus, les communautés en ligne de ces sportifs et artistes s’étendent en Afrique comme en France.

Publié le 2 avril, l’article de l’Equipe sur l’indignation du footballeur camerounais Samuel Eto’o sur Facebook est la publication la plus relayée sur Twitter avec plus de 2 100 partages. C’est elle qui suscite, dans une mesure importante, la vague de reprises par les médias généralistes francophones.

Une disparité d’acteurs mobilisés à divers niveaux

L’ampleur de la polémique et sa dangerosité en pleine crise sanitaire mondiale ont alerté l’Organisation mondiale de la Santé. C’est par la voix de son Directeur général, Dr Tedros, que les “propos racistes” du chercheur et du médecin français sur LCI ont été condamnés par l’OMS. Cette prise de parole explique la mobilisation et les interpellations des comptes institutionnels internationaux (@WHO, @onuinfo), mais aussi d’Emmanuel Macron qui évoque sa discussion avec Dr Tedros sur la situation en Afrique.

Malgré le nombre important d’articles publiés et partagés sur Twitter, plus de 7 600, l’influence des médias s’avère réduite dans la crise en ligne. La majeure partie des articles ont été publiés le 4 avril, soit le lendemain des pics de visibilité sur les réseaux sociaux. RFI et France Info sont les articles les plus RT sur Twitter, le premier sur les excuses du chercheur de l’Inserm, le second sur la réaction de l’OMS.

Les militants panafricanistes et anti-impérialistes connus des réseaux sociaux comme Kemi Seba et Nathalie Yamb suscitent de forts taux d’engagement sans pour autant faire porter leur voix au delà de leur communauté classique. La sociologue Kaoutar Harchi suscite plus de 5 000 RT et 7 000 likes en dénonçant le manque de considération pour les “corps féminins racisés”.

Le cas de la communauté sénégalaise sur Twitter

Si le Président sénégalais Macky Sall n’a pas réagi à la polémique des vaccins sur son compte Twitter, son tweet du 2 avril posté à la suite de sa conversation avec E. Macron sur les mesures conjointes à mettre en place pour lutter contre le Covid-19 en Afrique a été, lui, abondamment commenté par la communauté de twittos sénégalais (#Kebetu). Très active sur Twitter, celle-ci a interpellé Macky Sall sur la question des vaccins, l’enjoignant à refuser tout test sur le territoire sénégalais.

Par ailleurs, le Ministre de la santé du Sénégal, @abdioufsarr, a tweeté la vidéo de sa déclaration sur le sujet lors d’un échange télévisé sur la chaîne ITV Sénégal, le 3 avril.

Son tweet, affirmant que “l’Afrique n’est le dépotoir de personne”, est le 4ème tweet le plus retweeté au Sénégal.

La cartographie illustre le fait qu’Abdioulaye Diouf Sarr fait le lien entre la communauté #Kebetu et des comptes suivis par la diaspora comme @diasporamediaof, très actif sur cette polémique. Ces comptes de la diaspora présentent également une forte proximité avec des comptes de sportifs et artistes ayant amplifié la crise comme @ndiayegaindesn.

Une polémique qui a atteint les plus hauts sommets

Partie d’une séquence télévisée sur une chaîne française, la crise a enflé sur Twitter avant d’atteindre les plus hauts niveaux. Plusieurs Présidences et Président africains ont réagi à la polémique directement sur leurs compte Twitter, tout comme le Directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé.

À noter : le Président français a réagi à la polémique le 15 avril sur l’antenne de RFI pour dénoncer les “propos inconséquents” des deux chercheurs français.

Un public large touché par des stars populaires sur Facebook

Sur Facebook, les artistes africains dont les popularités nationales et continentales ne sont plus à développer se sont massivement mobilisés via leur page officielle.

Bien que les posts les plus relayés et partagés proviennent des footballeurs à la notoriété intercontinentale Samuel Eto’o et Didier Drogba, la mobilisation des artistes africains a permis d’ouvrir la visibilité de la polémique à une audience africaine large et plus populaire que sur Twitter. Parmi les plus engageants sur le sujet, les acteurs/producteurs ivoiriens Michel Gohou et Guy Kalou Emile, du chanteur Alpha Blondy et le chanteur congolais Koffi Olomide.

A l’instar des comptes des personnalités, des pages d’actualités, culturelles ou activistes très populaires, comme First Mag, “Musiciens chrétiens congolais” ou “La ligue de défense noire africaine” ont amplifié la visibilité de la polémique et ont suscité des taux d’engagement très élevés.

Sans surprise, les internautes expriment leur indignation en commentaires des articles de RFI ou encore du Parisien qui figurent parmi les publications médias les plus engageantes.

Profils des acteurs de la diffusion

Une propagation portée par deux types de profils

Deux types de profils ont porté la propagation de la polémique, chacun ayant eu un rôle précis dans la propagation :

Répartition des comptes ayant été actifs sur Twitter au sujet de la polémique, par nombre de followers
  • Les petits comptes, suivis par moins de 500 followers, représentent la masse de la mobilisation citoyenne : ils ont été très actifs autour de la polémique — ils sont les auteurs de 70% des tweets, mais n’ont généré qu’une très faible visibilité sur le réseau social
  • Les stars du sport et de la musique, dont les comptes dénombrent plus de 100 000 followers, ont permis deux choses : le déclenchement des reprises médiatiques de la polémique dès lors qu’elles s’en sont emparées, ainsi que l’ouverture et l’élargissement de la polémique au grand public qui les suit massivement sur Twitter.
Répartition des impressions générées par les comptes, par nombre de followers

Peu nombreuses parmi l’ensemble des comptes (elles représentent à peine 0,13% de l’ensemble des comptes), ces personnalités ont généré plus de la moitié des impressions liées à la crise. Leurs comptes, extrêmement suivis, ont ainsi étendu la visibilité de la polémique à des internautes peu politisés ou peu militants. Elles ont été soutenues par les micro-influenceurs et influenceurs, suivis par 5 000 à 50 000 followers, qui via leurs réseaux denses, actifs et connectés ont permis de déclencher une véritable mobilisation revendicatrice. Certains des tweets les plus retweetés (@__realea, @DidiBabeee) ont été postés par des comptes ne comptant qu’environ 1000 abonnés, preuve de la force de cette mobilisation revendicatrice.

Grand public et militants, en France et en Afrique

Les intérêts renseignés dans les biographies des comptes ayant réagi aux propos de Camille Locht et Jean-Paul Mira nous donnent à voir le type de public mobilisé tout au long de la polémique. On retrouve une forte prévalence des termes liés au sport et à la culture, matérialisant l’influence des stars de ces deux domaines dans la propagation de la crise sur le réseau social auprès de profils peu politisés.

La communauté de comptes militants, liée au champ lexical de la politique, étant de son côté activée par les comptes des micro-influenceurs et influenceurs.

La question de la profession des internautes semble également s’éclaircir au regard de leurs intérêts, une large partie d’entre eux faisant état de leur métier dans leur biographie. À noter une forte proportion de métiers liés à la communication et au digital, proportion relativement courante sur Twitter.

Par ailleurs, 26% des comptes ayant pris part à la polémique sur Twitter sont localisés en France, et notamment en Ile-de-France, où la diaspora africaine est très présente. Il s’agit du pays le plus représenté parmi les internautes, loin devant la Côte d’Ivoire (2%), la Belgique (1,9%) et le Sénégal (1,7%). Sur Facebook, l’écart entre la France (21%) avec le second pays le plus mobilisé, la Côte d’Ivoire (10,39%), est plus réduit que sur Twitter. Le Sénégal, troisième à 10%, devance le Cameroun à 5 % puis une multitude de pays africains de la sous-région et enfin d’Afrique centrale.

Cette répartition s’explique en partie par la notoriété transcontinentale des stars du football et de la musique qui se sont emparées de la polémique, au-delà du fait que la polémique est née en France à la suite de propos tenus par des chercheurs français.

Plusieurs profils africains issus des médias et du monde de la communication ont été prompts à s’emparer de la polémique.

Connectés et influents, ces micro-influenceurs et influenceurs du secteur ont pu rapidement activer leurs réseaux composés de Key Opinion Leaders.

Analyse des conversations

1 300 hashtags ont été utilisés au sein des 210 000 tweets du corpus analysé. Nous les avons cartographiés pour faire apparaître les liens entre eux.

En bleu ciel, on retrouve des hashtags des pays associés aux principaux hashtags relatifs à la pandémie, et à la réaction de l’OMS, dans une plus faible mesure.

Représentée en violet, une partie non négligeable des conversations est axée sur la République Démocratique du Congo, qui s’était déclarée favorable à une campagne de vaccination de ses habitants, avant de se dédire face à l’ampleur de la polémique. Plusieurs termes et hashtags font référence pèle mèle à la dimension coloniale, la médecine coloniale, le BigPharma ou le racisme.

Portée par le rappeur Kaaris, l’expression “rats de laboratoire” jouit d’une forte visibilité. La référence aux animaux fait également partie des plus récurrentes.

À noter : absence de hashtag mobilisateur dans les conversations francophones, contrairement au hashtag #AfricansAreNotGuineaPigs utilisé par les anglophones.

Sur Facebook, la colère prédomine

Colère, méfiance et rejet sont les trois registres principaux des réactions sur Facebook.

Les hashtags les plus utilisés dans les publications publiques relatives à cette crise sont, outre ceux contextuels (coronavirus, vaccin, LCI…), de l’ordre de l’opposition (“Y en a marre”, qui est également un mouvement de la société civile au Sénégal, “pas de vaccin en Afrique”, “l’Afrique n’est pas un laboratoire”) et de dénonciation du racisme de la France vis-à-vis des Africains, vis-à-vis des Africains globalement.

Le terme “masque”, présent dans 10 % des publications, est utilisé pour mettre en exergue l’ambivalence attribuée à la France : celle-ci ne dispose pas de masques en nombre suffisant pour protéger sa population mais aurait pour priorité de protéger les populations africaines. Le mot “complot” est également récurrent, présent dans 6 % des publications.

Fait marquant : le deuxième emoji de réaction le plus utilisé sur les posts Facebook analysés est celui de la colère, à hauteur de quasi 10%, un chiffre élevé. Si le like classique est polysémique, l’emoji colère ne laisse que peu de doute quant au sentiment exprimé par les internautes l’ayant utilisé.

Les fake news à l’assaut des contenus

Le traitement médiatique de la polémique, s’il s’est focalisé sur les propos tenus par les deux médecins et les différentes réactions qui en ont découlé, a également abordé un volet plus global de lutte contre les fake news.

Qu’il s’agisse d’articles répondant à des sollicitations de lecteurs (à l’instar du travail fait par AFP Factuel) ou de contenus dédiés (comme cette vidéo d’AJ+ au sujet de l’historique des tests effectués en Afrique), les médias ont été nombreux à traiter le sujet sous l’angle de la lutte contre la désinformation.

La polémique analysée ici est née sur un terreau déjà propice à la propagation de fake news dans le domaine sanitaire et médical. Le sujet des vaccins, testés ou commercialisés par des Occidentaux en Afrique, cristallise un bruit de fond constant depuis le début de l’apparition de la pandémie (cf les complots apparus il y a quelques jours), mais qui remonte en réalité à plusieurs années.

Il s’agit d’un marronnier de la désinformation sur les réseaux sociaux, qui s’appuie comme toute bonne fake news sur les ressorts de la peur et du complot et sur des faits avérés, citons par exemple ce témoignage issu d’un documentaire de Planète + affirmant que les Etats-Unis ont inoculé volontairement le virus du SIDA en Afrique et cet article du Monde Diplomatique de juin 2005 intitulé L’Afrique, cobaye de Big Pharma qui ont tous deux ressurgi après l’éclatement de la crise .

L’humour au service de l’indignation

Les 5 plus beaux pays africains où tester nos futurs vaccins”, “Plusieurs pays africains vont lancer en Europe des essais de traitement contre le racisme”, dès le 3 avril Le Gorafi, site d’information satirique français, publie un article évoquant la polémique, partagé plus de 300 fois sur Twitter.

Son deuxième article sur le sujet suscite lui aussi un engagement important sur les réseaux sociaux, notamment de la part d’internautes africains.

En complément de la satire, le registre de l’ironie est également utilisé par les internautes pour dénoncer et tourner en dérision les propos des deux chercheurs en mettant en parallèle les tests dont ils discutent et ceux pratiqués sur les animaux, suscitant eux une indignation large.

Et côté anglophone ?

Initialement francophone, la crise s’est rapidement exportée dans les régions anglophones, en Occident comme en Afrique. Côté anglophone, le volume de la polémique s’établit à un peu plus de 190 000 tweets publiés entre le 1er et le 8 avril.

Le schéma de propagation de la crise y est identique, avec un retard de deux jours.

Ici aussi, de nombreuses personnalités, qu’elles soient Africaines ou issues de la diaspora, issues du monde du sport ou de la culture ont permis d’attirer l’attention des médias grâce à leur notoriété. Il convient toutefois de noter qu’il s’agit principalement de personnalités francophones qui ont relayé le sujet à des publics anglophones, à l’instar de Didier Drogba qui, par des tweets publiés en anglais, a été le premier à étendre la polémique au-delà des frontières de la Francophonie.

La visibilité médiatique est également portée par des personnalités francophones, relevons par exemple l’article rédigé par Rokhaya Diallo et publié dans le Washington Post.

Plusieurs stars anglophones prennent ensuite son relai en s’emparant du sujet pour dénoncer vivement les propos tenus par les deux chercheurs français mais également, de manière plus globale, la position de l’Occident vis-à-vis de l’Afrique.

L’acteur et producteur britannico-nigérian John Boyega a par exemple posté un tweet ayant suscité plus de 150K RT.

Notons également ce tweet, retweeté plus de 13K fois, qui relaie une vidéo publiée initialement sur Tik Tok pour dénoncer les propos des chercheurs, signe que la polémique a fait le tour des réseaux sociaux autant qu’elle a fait le tour du monde.

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[Le Point Afrique] Covid-19 – « Les vaccins en Afrique ? Un sujet éminemment politique ! »

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de poser le cadre de l’événement qui a conduit à cette étude réalisée en partenariat par Afriques connectées, laboratoire d’analyse des phénomènes viraux en œuvre sur les réseaux sociaux en Afrique, et 35° Nord, agence de conseil en stratégie de communication dédiée au continent africain. S’étant récemment alliées afin de couvrir et analyser les discussions sur les réseaux sociaux africains concernant le Covid-19, ces deux structures vont vite être servies par un événement qui a eu lieu le 1er avril sur le plateau de LCI, chaîne d’information en continu du groupe audiovisuel français TF1.

Ensemble, Afriques connectées et 35° Nord ont analysé cette polémique qui a fait réagir autorités politiques, société civile, populations, associations antiracistes, gouvernements africains et même des instances internationales. Leurs directeurs, Manon Fouriscot pour Afriques connectées et Romain Grandjean pour 35° Nord, ont décrypté pour nous cette étude. Entretien.


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